En Tunisie, une quarantaine d'opposants condamnés à de lourdes peines de prison pour "complot" contre le président Kaïs Saïed
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Le tribunal de première instance de Tunis a infligé des peines de prison de 13 à 66 ans, ont annoncé samedi 19 avril plusieurs médias, à l'issue d'un procès inédit pour "complot" contre le président Kaïs Saïed, dans lequel étaient jugés une quarantaine d'accusés, dont des figures de l'opposition.
Les prévenus ont été jugés coupables à divers degrés de "complot contre la sûreté de l'Etat" et d'"adhésion à un groupe terroriste", a précisé un responsable du Parquet antiterroriste, qui a donné l'information sans autres détails aux médias, dont la radio Jawhara FM. L'agence de presse TAP a confirmé ces condamnations par le biais d'un communiqué.
Parmi les condamnés se trouvent des personnalités connues de l'opposition, des avocats et des hommes d'affaires. Certains sont emprisonnés depuis leur arrestation il y a deux ans, d'autres en liberté et une partie en exil à l'étranger. Vendredi soir, lors de la troisième et dernière audience de ce procès, sans précédent par le nombre d'accusés et les chefs d'accusation, plusieurs avocats de la défense ont dénoncé "une mascarade" quand le juge a terminé la lecture de l'acte d'accusation et mis sa décision en délibéré, sans réquisitoire ni plaidoiries de la défense.
Parmi les grands noms du procès figuraient le chef du parti Al Joumhouri, Issam Chebbi, le cofondateur de la principale coalition d'opposition Front de Salut National (FSN), Jawhar Ben Mbarek, et un ancien dirigeant du parti islamiste Ennahdha, Abdelhamid Jelassi.
"Un verdict préparé à l'avance, sans surprise"
L'audience, dont les journalistes internationaux et les diplomates étrangers étaient exclus, contrairement aux deux précédentes, a été particulièrement houleuse et s'est tenue sous haute surveillance policière. Des contacts suspects avec certaines ambassades étaient reprochés à plusieurs accusés.
L'un des condamnés partis à l'étranger, Kamel Jendoubi, a dénoncé un "assassinat judiciaire". "Ce n'est pas une décision de justice, c'est un ordre politique exécuté par des juges aux ordres, des procureurs complices et une ministre de la Justice, bras armé d'un autocrate paranoïaque", a fustigé ce militant des droits humains et ancien ministre.
Pour l'avocate Haifa Chebbi, fille de l'homme politique Ahmed Nejib Chebbi, l'un des accusés laissés en liberté, "c'est un verdict préparé à l'avance, sans surprise". "Je suis triste pour la justice en Tunisie et l'état des libertés", a-t-elle déclaré samedi à l'AFP, sans pouvoir donner d'information sur la peine infligée à son père.
Depuis le coup de force de Kaïs Saïed à l'été 2021, par lequel il s'est octroyé les pleins pouvoirs, défenseurs des droits et opposants dénoncent une régression des libertés en Tunisie, pays qui avait lancé le Printemps arabe en 2011. Des dizaines de responsables politiques, avocats, militants des droits notamment des migrants, et chroniqueurs connus ont été arrêtés à partir du printemps 2023, en vertu d'un décret réprimant la diffusion de fausses nouvelles, contesté comme prêtant à une interprétation trop large.
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